jeudi 2 juillet 2009

L'INFANTICIDE ET LA JUSTICE

Louise Desnoyers a pris perpet... comme ils disent au cinéma. Sauf que ce n'est pas du cinéma, c'est la vraie vie, un vrai drame.

La sentence à perpétuité prononcée dans ce petit tribunal du Vermont équivaut à 15 années de réclusion. Mettons que cette mère québécoise qui a tué son enfant, qui a plaidé coupable en déclarant avoir agi dans un inexplicable et  incompréhensible moment d'égarement en a déjà fait trois. Il lui en reste donc 12. Douze années perdues dans une éternité de douleur?

La loi, c'est la loi, certes. Mais déjà la loi n'est pas partout la même. Elle n'a pas le même poids pour les femmes adultères de l'Orient. Elle n'a même pas le même poids quand on est jugé là, juste là, de l'autre côté de la frontière, dans un bled aussi tranquille que perdu, à deux pas de Rouses Point, où il ne se passe jamais rien...ou presque.

Or, il y a deux jours, il s'est passé quelque chose. Un juge a condamné une infanticide à la prison. J'ai vu ces images à la télévision, comme vous. Et comme vous, j'ai eu des frissons. En constatant son désespoir, en voyant ses larmes rouler sur ses joues alors qu'elle s'est adressée au juge en anglais pendant une demi-heure.

 Elle a vu ses yeux quand il s'est débattu,  a-t-elle dit, les yeux hagards de son gamin en lui enfonçant la tête sous l'eau; mais elle ne voulait pas, répétait-elle. Elle ne voulait pas. Et vous savez quoi? Je la crois.

Et à la sortie du tribunal, un tout petit tribunal qui avait l'air encore plus minuscule dans ma télé, cette mère  prononçait des mots d'incompréhension, étouffés par les sanglots, mais des mots qui résonnaient sur les colonnes du temple: «C'est pas possible, pas possible...»

Êtes-vous déjà allé dans cette cour du Vermont. Moi, oui. C'est pour ça que je sais à quel point c'est petit, aussi petit et étriqué que les mentalités des coins isolés d'une Amérique qui se croit le bras de la justice divine. 
Rigide d'ailleurs comme la justice, quand elle reste imperméable à la compassion; quand elle refuse de plier l'échine et d'entendre raison; quand elle écarte le passé irréprochable d'une accusée, son état mental que des experts ont jugé affecté,  sa détresse, sa folie du moment. 

Pas question de nier le crime. Même Louise Desnoyers ne le nie pas. Mais l'errance, dites-moi, existe-t-elle?

La loi est tombée telle l'épée de Damoclès.

La loi, c'est la loi. Bien. Et la justice, elle?

Les images de Louise Desnoyers encaissant le prononcé de sa sentence étaient bouleversantes.

Les 15 années qui viendront, si elle les traverse, oui, si elle les traverse seront terrifiantes. Prisonnière étouffée davantage par le remords que par l'exiguïté de son cachot.

Je sais, il y a eu une crime. 

Je sais aussi qu'il n'y a plus grande douleur qu'une mère qui survit à son enfant.

Or, y a-t-il plus grande horreur qu'une mère qui tue de ses propres mains son petit, innocent.

Il y a la douleur, il y a l'horreur, mais y a-t-il eu justice?